La Communauté germanophone de Belgique  

La Communauté germanophone de Belgique

Die Deutschsprachige Gemeinschaft Belgiens

 

Capitale: Eupen
Population: 70 400 dans la région de langue allemande (110 000 pour toute la Belgique)
Langue officielle: allemand
Groupe majoritaire: allemand (95 %)
Groupes minoritaires: français (communes à facilités)
Système politique: gouvernement communautaire avec base territoriale dans la région de langue allemande (qui occupe l’extrémité est de la Wallonie)
Articles constitutionnels (langue): art. 2, 4, 67, 115, 118, 121, 123, 130, 139, 140, 176 de la Constitution de 1994
Lois linguistiques (gouv. belge): plusieurs linguistiques belges applicables aux germanophones dont la loi du 30 juillet 1955 modifiant la loi du 30 juillet 1938 concernant l'usage des langues à l'armée; la loi du 30 juillet 1963 (relative au régime linguistique de l'enseignement; la Loi sur l'emploi des langues en matière administrative coordonnée le 18 juillet 1966; la loi du 30 novembre 1966; la loi du 2 juillet 1969 (Emploi des langues en matière judiciaire); la loi du 10 juillet 1973 et la loi du 31 décembre 1983.

1 La base territoriale de juridiction

La base territoriale de juridiction de la Communauté germanophone correspond à la région de langue allemande, laquelle est située à l’extrémité est de la province de Liège, d’où le nom ancien de Cantons de l’Est: canton d’Eupen au nord et canton de Saint-Vith au sud. Le territoire de la Communauté germanophone est englobée à l’intérieur de la Région wallonne, laquelle relève de la juridiction du Parlement wallon et de la Communauté française de belgique. Cependant, la Communauté germanophone ne relève de l'Administration de la Région wallonne (capitale: Namur) que pour ce qui correspond essentiellement aux matières d'équipement. Les communes de Malmedy et de Waimes ne sont pas comprises dans cette juridiction. Elles relèvent de la Communauté française de Belgique (Bruxelles).

Communauté germanophone Le drapeau de la Communauté germanophone représente un lion; celui-ci fait référence aux lions des anciens duchés de Limbourg et de Luxembourg. La région d'Eupen a déjà appartenu au Limbourg et une grande partie de la région de Saint-Vith au Luxembourg jusque 1794. L'animal héraldique est entouré de neuf fleurs stylisées représentant les neuf communes de la région de langue allemande.

Le territoire germanophone occupe une superficie d’environ 854 km² et se compose de deux parties différentes. Au nord, se situe le canton d'Eupen (en rouge au nord), s’étendant jusqu’aux Trois Frontières pour avoisiner les Pays-Bas; au sud, se trouve le canton de Saint-Vith (en rouge au sud), dont le centre est la petite ville de Saint-Vith, et qui s’étend en direction du sud jusqu’au grand-duché de Luxembourg. Ces deux cantons sont géographiquement séparés par une distance d’environ 10 km par le territoire de la commune de Waimes appartenant à la région de langue française. Pour passer, par exemple, d'Eupen à Saint-Vith, il faut forcément «sortir» de la zone germanophone. On peut consulter une carte détaillée de la région germanophone en cliquant ICI.

Les germanophones forment le troisième groupe linguistique en Belgique. Au total, ils comptent plus de 70 000 locuteurs (sur une population totale de 110 000 pour toute la Belgique) dans la région linguistique de langue allemande, située dans la province de Liège. 

Les germanophones habitent neuf communes germanophones: Kelmis, Eupen, Lontzen, Raeren, Bütgenbach, Büllingen, Amel, Sankt-Vith et Burg-Reuland. Ces communes forment ce qu’on appelle «la Nouvelle Belgique» qui comprend le canton d’Eupen au nord et le canton de Saint-Vith au sud. Entre les deux cantons, se trouvent les communes dites malmédiennes, lesquelles sont des communes wallonnes mais «avec facilités limitées en allemand». Ces communes malmédiennes sont au nombre de deux: Malmédy/Malmünd (Malmédy, Belleveaux-Ligneuville et Bevercé) et Waimes/Weismes (Waimes, Faymonville/Aussenborn et Robertville).

Répétons-le, ces communes séparent géographiquement le canton d'Eupen du canton de Saint-Vith. Précisons que toutes les communes germanophones offrent des «facilités en français» pour les Wallons.


Source: http://www.lbc-nvk.be/french/belgium.asp

En matière communautaire, la Communauté française n’a donc pas juridiction dans la région linguistique allemande. Un peu plus à l’ouest, les communes dites malmédiennes et, au sud, les communes de la région d’Arlon ne font pas partie de ce qu’on appelle la «région de langue allemande» (mais de la «région de langue française») restée sous la juridiction de la Communauté française. Le Conseil de la Communauté germanophone, le Rat der Deutschsprachigen Gemeinschaft, est composé de quelque 25 membres élus au suffrage universel par les citoyens belges domiciliés dans la région de langue allemande. L'Exécutif de la Communauté germanophone, l’Exekutive der Deutschsprachigen Gemeinschaft, est composé de trois membres et il siège à Eupen (dans la région de langue allemande).

Bien qu'ils possèdent leur parlement communautaire, les germanophones ne disposent pas d'un parlement de la Région allemande. C'est le Conseil wallon et l'Exécutif de la région wallonne qui sont en partie responsables des affaires régionales des germanophones (aménagement du territoire, logement, préservation de la nature et environnement, politique de l'eau, agriculture, énergie, etc.). La Communauté germanophone ne peut adopter de décrets linguistiques puisque, en vertu de la Constitution, c’est le gouvernement fédéral qui demeure seul compétent pour légiférer en matière de langue dans cette région linguistique, sauf en matière d’éducation.

2 Données démolinguistiques

On compte environ 110 000 germanophones en Belgique. Seulement 70 400 vivent dans la région où l'allemand standard est officiellement reconnu, soit dans la région d’Eupen et de Saint-Vith. Il n’est reconnu que partiellement (administration, tribunaux et enseignement) dans les communes dites malmédiennes (communes de Malmédy et Waimes: env. 3200 locuteurs) un peu plus à l’ouest et dans les régions plus au sud (province de Luxembourg) où il n'est pas reconnu, soit les régions d’Arlon et de Montzen (environ 40 000 à 45 000 habitants dont 14 000 locuteurs luxembourgeois). On compte certainement de nombreux germanophones dans la région de Bruxelles-Capitale, mais leur nombre n'est pas recensé.

Contrairement à une idée reçue, la «région de langue allemande» ne constitue pas une région tout à fait homogène sur le plan linguistique. Non seulement compte-t-on une petite minorité francophone (env. 5 %) qui bénéficie de «facilités», mais les germanophones parlent, en plus de l’allemand standard, différents dialectes franciques mosellans et bas-franciques. Il est vrai que ces dialectes sont en régression constante et qu'ils se transmettent de moins en moins d'une génération à l'autre, voire plus du tout dans certains cas; cela signifie qu'ils sont en voie d'extinction. On peut visualiser une carte linguistique de toutes les variétés de francique en cliquant ICI, s.v.p.

Dans les communes malmédiennes, des facilités sont accordées aux germanophones, alors que ceux qui habitent la région d’Arlon/Arel ne disposent d'aucune facilité, puisque leur langue — le luxembourgeois — n’est pas officiellement reconnue par la législation belge. Tous les habitants de la «région de langue allemande» et parlant une langue germanique ne pratiquent pas nécessairement le français comme langue seconde, car beaucoup de germanophones ne connaissent que l'allemand. Si les commerçants des centres urbains sont tous au moins bilingues, ce n'est pas le cas dans les villages, restés unilingues germanophones.

Comme nous le constatons sur la carte ci-dessous (écrite en luxembourgeois), l’aire germanophone de la Wallonie (Wallouneschen) est répartie de la façon suivante entre ce qu’on appelle la Nouvelle Belgique (en blanc) et l’Ancienne Belgique (en gris):

- l'Ancienne Belgique: la Nordlech Albelsch (Ancienne Belgique du Nord) ainsi que la région d’Aubel; la Mëttelst Albelsch (Ancienne Belgique du Centre) ou région de Bochloz devenue aujourd’hui la commune de Gouvry et la Südlech Albelsch (Ancienne Belgique du Sud) près de la frontière du grand-duché de Luxembourg;

- la Nouvelle Belgique comprenant le canton d’Eupen au nord et le canton de Saint-Vith (Zent Väit en luxembourgeois) au sud;

Les communes malmédiennes (région de Malmédy), qui ne sont pas des communes germanophones, séparent géographiquement le canton d'Eupen et celui de Saint-Vith.

2.1 Les cantons germanophones du Nord «avec facilités en français»

Il s’agit des communes de la région appelée Nord Neubelgien (ou Nouvelle Belgique du Nord), qui comprend le canton d’Eupen, soit les communes d’Eupen [Eupen et Kettenis], Kelmis [les deux Moresnet et Hergenrath], Lontzen [Lontzen et Walhorn], Raeren [Raeren, Eynatten et Hauset]). Le canton d'Eupen compte environ 41 000 germanophones, lesquels parlent le limbourgeois ripuaire, un dialecte pouvant être considéré comme appartenant au néerlandais ou à l'allemand.

Signalons aussi les communes de la région appelée Süd Neubelgien (ou Nouvelle Belgique du Sud) comprenant le canton de Saint-Vith, avec les communes de Saint-Vith [Sankt-Vith, Crombach, Lommersweiler, Schönberg et Recht], Bütgenbach [Bütgenbach et Elsenborn], Büllingen [Büllingen, Manderfeld et Rocherath], Amel [Amel, Heppenbach et Meyerode] et Burg-Reuland [Reuland et Thommen]. Le canton compte environ 28 000 germanophones qui parlent l’allemand mosellan ou francique mosellan très apparenté au luxembourgeois.

On appelle ces deux cantons Neubelgien (ou «Nouvelle Belgique») parce que ce sont les territoires annexés après la Première Guerre mondiale (à l'exception de Moresnet-Neutre). La région germanophone de Belgique se compose de territoires incorporés au pays après 1918, qu'on peut appeler «Nouvelle Belgique» (NB), et de territoires appartenant à la Belgique avant cette date, que nous appelons «Ancienne Belgique» (AB). Les francophones ne forment qu'une minorité presque inexistante au sud, mais ils sont plus nombreux au nord (5 %). Ces communes offrent des facilités en français aux francophones. Le territoire de la «Nouvelle Belgique» correspond à la région officielle de langue allemande et constitue la base territoriale de la Communauté germanophone (cantons d'Eupen et de Saint-Vith).

2.2 Les communes de la Wallonie malmédienne «avec facilités limitées en allemand»

Ces communes wallonnes (situées au sud d'Eupen) mais «avec facilités limitées en allemand» sont au nombre de deux: Malmédy/Malmünd (Malmédy, Belleveaux-Ligneuville et Bevercé) et Waimes/Weismes (Waimes, Faymonville/Aussenborn et Robertville). Sur une population de 16 000 habitants, environ 20 % des habitants parlent l’allemand comme langue maternelle (soit 3200 locuteurs). Ces communes font officiellement partie de la région de langue français, mais elles bénéficient de facilités limitées (enseignement, administration, tribunaux) en allemand.

2.3 Les communes de l’«Ancienne Belgique»: aucun droit

La région prétendument germanophone dite de l’«Ancienne Belgique» (env. 42 000 personnes) compte trois zones:

- l'Ancienne Belgique du Nord (sur la carte luxembourgeoise: la Nordlech Albelsch), qui comprend la région de Montzen (9000 hab.), également appelée région de Welkenraedt ; la région d'Aubel (3700 hab.) y est parfois incluses; on y parle le français et le limbourgeois (dialecte néerlandais dans une forme non hollandisée); le «limbourgeois» de cette région est désigné par le terme platt, car limbourgeois est une appellation officielle néerlandaise pour nommer la langue parlée dans la province du Limbourg aux Pays-Bas.

-l'Ancienne Belgique du Centre (sur la carte luxembourgeoise: la Mëttelst Albelsch) avec la commune de Gouvy (4400 hab.) et les villages de Beho (301), Deiffelt (124), Ourthe et Wathermal; signalons que la région de Bocholz est incorporée aujourd'hui à la commune de Gouvry; on y parle le français et l’allemand  ou francique mosellan; 

- l'Ancienne Belgique du Sud (sur la carte luxembourgeoise: la Südlech Albelsch), c’est-à-dire la région d’Arlon/Arel (24 000 hab.) à la frontière luxembourgeoise, où l’on parle le français et le luxembourgeois (peut-être 14 000 locuteurs).

On peut visualiser la carte illustrant l’aire linguistique du luxembourgeois (en turquoise) au sud-est de la Wallonie près de la frontière luxembourgeoise (capitale: Arlon/Arel). En fait, aujourd’hui, les habitants de l’«Ancienne Belgique» ne font pas juridiquement partie de la région germanophone et ils sont réputés comme étant «francophones», voire unilingues francophones, selon les standards belges qui ne prennent en considération que les territoires de résidence, non les locuteurs. En vertu de la législation fédérale, seul le français jouit du statut de langue officielle en «Ancienne Belgique»; c’est pourquoi seule cette langue est reconnue dans l’Administration, les écoles et les tribunaux.

Les germanophones en Belgique sont répartis dans 12 des 589 communes du pays, mais, rappelons-le, ils n’ont des droits linguistiques que dans les communes de la «Nouvelle Belgique». Ceux qui résident dans les communes dites malmédiennes ne bénéficient que des «facilités limitées en allemand», alors que ceux qui vivent dans les communes de l’«Ancienne Belgique» n’ont aucun droit reconnu, puisqu’ils ne sont pas considérés comme «germanophones». Le législateur a dû considérer que les «germanophones» de cette région ne parlaient pas une «langue», mais seulement des «dialectes» germaniques (allemand mosellan, limbourgeois et luxembourgeois). D’ailleurs, les locuteurs de ces «dialectes» n’identifient leur langue ni au néerlandais ni à l’allemand, preuve de l’existence dans leur esprit d’une langue distincte. Depuis que le grand-duché de Luxembourg a reconnu en 1984 le luxembourgeois comme la «langue nationale» du grand-duché, les «germanophones» de la région d’Arlon, notamment par la voix de l’organisme ALAS (Areler Land a Sprooch), ont bien tenté en vain de se faire reconnaître des droits.

Ajoutons que les habitants des communes de Plombières, Aubel, Welkenraedt et Baelen pourraient éventuellement recourir à un décret royal dit «potentiel» leur permettant de modifier leur statut d’unilinguisme en un statut de bilinguisme ou de trilinguisme. Mais sa mise en application exigerait l’adoption d’une loi par le Parlement belge. Jusqu’à ce jour, cette potentialité ne s'est jamais matérialisée.

3 Données historiques

La présence d'une communauté de plus de 100 000 germanophones en Belgique s'explique évidemment par des événements historiques qui ont modifié les frontières des États, sans toujours tenir compte des langues parlées par les habitants.

En 648, Sigebert II, roi des Francs, accorda la région ardennaise de Malmédy-Stavelot à Rémacle, évêque de Maastricht (situé aujourd’hui dans la province de Limbourg aux Pays-Bas). Celui-ci fonda un abbaye à Stavelot, qui devint la capitale d’une principauté ecclésiastique. En 720, l'évêché de Maastricht fut transféré à Liège. À la suite du traité de Verdun en 843, Liège fit partie de la Francia media, future Lotharingie. En 925, la région de Liège, comme toute la Lotharingie, tomba sous l’autorité des rois de Germanie, dont l’un d’eux, Otton I, reprit en 962 le titre d’empereur romain de la nation germanique. Dès lors, et jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, Liège fit partie du Saint Empire romain germanique.

Toute cette région située à la limite des langues romanes et germaniques fut le théâtre de conflits entre les grandes puissances féodales de l’époque (Bourgogne, Flandre, France, Pays-Bas, etc.). Jusqu’en 1794, le canton d’Eupen appartenait au duché de Limbourg administré depuis la bataille de Worringen (1288) par les ducs de Brabant. Le canton de Saint-Vith appartenait en grande partie au duché et/ou à la province de Luxembourg; seul le territoire de Manderfeld-Schönberg faisait partie de la principauté épiscopale de Trèves. Tant au nord qu’au sud, les citoyens parlaient des dialectes tels que le bas-francique, le francique rhénan et le francique de la Moselle.

En 1795, la France révolutionnaire conquit les Pays-Bas autrichiens (y compris le Limbourg et le Luxembourg), la principauté de Liège ainsi que la principauté abbatiale de Stavelot-Malmédy. Le canton d’Eupen et le canton de Saint-Vith furent annexés à la France, à l’exception du territoire de Manderfeld-Schönberg, appartenant depuis 1789 au département de la Sarre. Sous le Consulat et l’Empire, la région forma une partie du département de l’Ourthe (Décret sur la réunion de la Belgique et du Pays de Liège à la France). À la suite de la défaite napoléonienne à Waterloo, le Congrès de Vienne attribua, en 1815, l’ancien territoire de la principauté de Liège aux Pays-Bas-Unis. La région de langue allemande actuelle fut exclue du rattachement à la Belgique en suivant les limites des cantons de Saint-Vith, Schleiden, Cronemboug, Malmedy, Eupen. Cette situation fut confirmée lors du Traité de limites entre les Pays-Bas et l'Autriche conclu à Vienne, le 31 mai 1815, comme devant être l’acte final du Congrès de Vienne:

Dans l'ancien département de l'Ourthe, les cinq cantons de St-Vith, Malmedy, Cronenbourg, Schleyden et Eupen, avec la pointe avancée du canton d'Aubel, au midi d'Aix-la-Chapelle, appartiendront à la Prusse, et la frontière suivra celle de ces cantons, de manière qu'une ligne tirée du midi au nord coupera ladite pointe du canton d'Aubel et se prolongera jusqu'au point de contact des trois anciens départements de l'Ourte, de la Meuse-Inférieure et de la Roer.

La nouvelle frontière fut délimitée le 26 juin 1816 lors du traité d’Aix-la-Chapelle ratifié par le roi des Pays-Bas et le roi de Prusse. Mais, ce qui était relativement normal à l’époque, le partage ne tint pas compte des données linguistiques de la région. Du coup, quelques milliers de nouveaux citoyens germanophones devinrent des ressortissants du nouveau «royaume de Belgique et des Pays-Bas». On appelle aujourd’hui ce territoire l’«Ancienne Belgique» (Altbelgien). 

La région de Moresnet-Neutre (dit «La Calamine») présente une curiosité: le territoire fut alors placé sous double administration prusso-néerlandaise (depuis 1830 prusso-belge), car il faisait l’objet de convoitises en vertu de ses riches gisements de calamine. Jusqu’en 1914, Moresnet-Neutre était une sorte de mini-État avec sa propre monnaie et ses timbres (très recherchés par les collectionneurs !), mais co-administré par la Prusse et les Pays-Bas (puis la Belgique après 1830). En 1846, la population de Moresnet belge ne comptait que 516 habitants, et en 1960 on dénombrait 1344 personnes à Moresnet, 4954 à Kelmis et 874 à Neu-Moresnet. En ce qui concerne la langue: le dialecte local était le limbourgeois oriental. C’était le «platt» en dialecte, le «Platdiets» en néerlandais (bas-thiois).

Un arrêté royal de 1818 fit ensuite passer une partie du territoire (le canton de Vielsalm au nord-est de la province de Luxembourg actuelle) du royaume des Pays-Bas-Unis au grand-duché de Luxembourg, possession personnelle de Guillaume 1er d'Orange-Nassau. En 1823, un arrêté grand-ducal fixa la composition des communes au sud de Vielsalm: la commune de Beho (avec les villages de Commanster, Deiffelt, Ourthe et Wathermal) — aujourd’hui Gouvy — furent transférés au grand-duché de Luxembourg. Après la révolution Belge (1831), les grandes puissances de l’époque fixèrent les limites du royaume et du grand-duché (qui resta attaché à la couronne des Pays-Bas jusqu'en 1839). Le critère de la frontière avait été la conformité des langues parlées: le luxembourgeois ou le wallon. En principe, la commune de Beho (très germanisée) aurait dû à l'époque rester dans le grand-duché, mais une méconnaissance de la situation sur le terrain octroya le territoire à la couronne des Pays-Bas. Il en résulta que le Luxembourg fut coupé d'une partie de son territoire: la région d'Arlon et de Beho (Gouvy) revint à la Belgique, tandis que le reste du grand-duché resta entre les mains de Guillaume d'Orange. C'est ce qui explique que les locuteurs de la région d'Arlon en Wallonie parlent encore le luxembourgeois.

À la fin de la période hollandaise (1815-1830), la situation dans la région germanophone était la suivante: les régions d’Eupen et de Malmédy appartenaient à la Prusse, tandis que la région d’Arlon au sud (qui faisait partie du grand-duché de Luxembourg) et les communes de Montzen et de Gemmenich (qui faisaient partie de la province de Liège) relevaient du royaume des Pays-Bas-Unis.

Lors du traité belgo-hollandais du 16 février 1839 et du Protocole de Londres du 19 avril 1839, la Belgique céda, en échange de la reconnaissance de son indépendance par les Pays-Bas, le nord de l’ancien duché de Limbourg (province de Liège) et une partie du Luxembourg, mais la région d'Arlon fut séparée du grand-duché. Dès lors, les textes officiels ne furent plus traduits en allemand. En matière administrative et judiciaire, le français devint pratiquement la seule langue utilisée avec le néerlandais. L’enseignement de l’allemand fut néanmoins permis au primaire. Il restait encore quelque 10 00 Wallons dans la région de Malmédy. Durant la Première Guerre mondiale, l’occupation allemande du territoire eut pour effet de rendre l’allemand l’unique officielle dans la région. Les habitants d’Eupen-Malmédy luttèrent en tant que citoyens allemands pour l’armée prussienne. Le nombre de morts et de disparus s’éleva à 766 personnes pour l’arrondissement d’Eupen et à 1082 pour l’arrondissement de Malmédy.

Après la Première Guerre mondiale, le traité de Versailles (1919) – à la suite d’un référendum contesté – imposa à l'Allemagne de céder à la Belgique Moresnet-Neutre, les arrondissements germanophones d'Eupen-Malmédy et de Saint-Vith (sans oublier le territoire africain du Ruanda-Urundi, ancienne colonie allemande, placé sous mandat belge pour administrer le Burundi et le Rwanda). Là aussi, dans le cas des cantons germanophones d'Eupen-Malmédy et de Saint-Vith, on n’a pas tenu compte à l’époque de l'existence de la population de langue allemande. Ce territoire est aujourd’hui appelé la «Nouvelle Belgique» (Neubelgien).

Un décret belge du 30 septembre 1920 abolit toutes les dispositions relatives à l’usage exclusif de l’allemand et mit à parité le français et l’allemand comme langues co-officielles. Au cours des années 1920-1925, les anciens arrondissements furent placés sous le régime de transition autoritaire du lieutenant-général Baltia, après avoir été répartis en trois cantons judiciaires: Eupen, Malmédy et St Vith. L’arrêté royal du 4 octobre 1925 réglementa l’emploi des langues en matière judiciaire et administrative et confirma les «facilités» existantes en ce qui a trait à la langue allemande. En 1925-1926, des négociations secrètes entre la Belgique et l’Allemagne eurent dans le but de rétrocéder le territoire d’Eupen-Malmédy à l’Allemagne en échange de 200 millions de mark-or. Les négociations échouèrent en raison de l’opposition farouche de la France.

La loi belge du 14 juillet 1932 prescrivit le néerlandais comme langue officielle de la Flandre, le français comme langue officielle de la Wallonie, l'allemand comme langue officielle de la région d'Eupen et de Saint-Vith (région germanophone – voir les détails). Consulter également une autre carte en cliquant ICI.

Seule la ville de Bruxelles, enclavée en territoire flamand, fut déclarée bilingue. Le français et le néerlandais devinrent alors les langues co-officielles de l'État belge. La situation resta stable jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. 

Durant l'occupation nazie (1940-1944), se souvenant peut-être de l'erreur de 1831, le Troisième Reich annexa par l’arrêté du 18 mai 1940 tous les territoires belges où l’on parlait l’allemand. Les arrondissements Eupen-Malmédy ainsi que certaines bandes de territoire de l’ancienne Belgique furent simplement incorporés dans le Reich. Les Allemands germanisèrent non seulement la région d’Eupen et de Malmédy (province de Liège) mais également la région d’Arlon, plus au sud (province de Luxembourg). L’allemand devint l’unique langue officielle, mais tous les territoires germanophones annexés furent restitués à la Belgique après la guerre. Le ministre belge de l’Intérieur ordonna alors une «réassimilation aussi prompte que possible» des territoires récupérés, si bien que la langue allemande perdit son statut officiel et disparut de l’administration, des écoles, des tribunaux et même des églises.

En 1956, les accords de septembre belgo-allemands furent signés. La République fédérale d’Allemagne reconnut la nullité que constituait l’annexion en 1940 du territoire d’Eupen-Malmédy. Les deux pays convinrent d’une rectification frontalière, d’un accord culturel belgo-allemand, ainsi que du versement de compensations financières. L’accord culturel signé en 1958 posa les bases d’une période de rapprochement et de coopération belgo-allemande. Ce nouveau climat de détente entre les anciens adversaires de guerre profita à la population germanophone de Belgique. Les réticences de l’État belge à reconnaître les droits linguistiques et culturels ainsi que l’autonomie institutionnelle de la Communauté germanophone finirent par s’estomper.

Puis, la Loi sur l'emploi des langues en matière administrative du 18 juillet 1966 institua le régime linguistique tel qu'on le connaît aujourd'hui. Les frontières de la «région de langue allemande» furent précisées et des «communes à statut spécial» pour les francophones et les germanophones (selon le cas) furent prévues. Voici que ce prévoit l’article 5 quant aux communes faisant partie de la région de langue allemande: 

La région de langue allemande comprend les communes de: Eupen, Eynatten, Hauset, Hergenrath, Kettenis, La Calamine, Lontzen, Neu-Moresnet, Raeren, Walhorn, Ambleve, Bullange, Butgenbach, Crombach, Elsenborn, Heppenbach, Lommersweiler, Manderfeld, Meyerode, Recht, Reuland, Rocherath, Saint-Vith, Schönberg et Thommen.

On constatera que la région d’Arlon au sud, une partie de l’«Ancienne Belgique», ne fait pas partie de ce régime linguistique, puisque la loi confirme que le territoire de la «Nouvelle Belgique» constitue la base territoriale de la Communauté germanophone. L'alinéa 1° de l'article 8 prévoit un régime de protection de la minorité de langue française dans «les communes de la région de langue allemande» (arrondissement de Verviers). À l’inverse, l'alinéa 2° détermine un régime de facilités pour la minorité germanophone dans les «communes malmédiennes»: Bellevaux-Ligneuville, Beverce, Faymonville, Malmédy, Robertville et Waimes. On constate que la région d’Arlon au sud, constituant l’«Ancienne Belgique», ne fait pas partie de ce régime linguistique (aucune protection).

Lors des réformes de l’État belge entre 1968 et 1971, les cantons d’Eupen et de Saint-Vith formèrent la région de langue allemande, tandis que la Communauté germanophone de Belgique fut instituée. Comme on le sait, la base territoriale de juridiction de la Communauté germanophone est située à l’extrémité est de la Région wallonne dont elle fait juridiquement partie.

Depuis 1980, le Parlement de la Communauté germanophone jouit d’une compétence législative dans toutes les matières relatives à la langue, à la culture et à l’enseignement. Le territoire de la «Nouvelle-Belgique» est ainsi devenu l’une des trois communautés qui constituent la Belgique fédérale.

4 La politique linguistique germanophone

La politique linguistique de la région de langue allemande est définie dans la Loi sur l'emploi des langues en matière administrative du 18 juillet 1966 et dans quelques dispositions constitutionnelles prévues dans les versions de 1970, 1980, 1989 et 1994. Comme pour la Communauté française et la Communauté flamande, le gouvernement germanophone ne fait qu'appliquer les lois belges, mais peut réglementer l'emploi des langues au plan local, notamment dans l'enseignement. Quoi qu’il en soit, la Communauté germanophone doit respecter la législation belge concernant les communes à facilités prévues à l’intention des francophones. En vertu de l’article 130 (révisée au 20/5/97) de la Constitution, le Conseil de la Communauté germanophone règle par décret :

1° les matières culturelles;

2° les matières dites personnalisables;

3° l'enseignement dans les limites fixées par l'article 127, à l’exception: a) de la fixation du début et de la fin de l'obligation scolaire; b) des conditions minimales pour la délivrance des diplômes ; c) du régime des pensions des enseignants;

4° la coopération entre les communautés, ainsi que la coopération internationale, y compris la conclusion de traités, pour les matières visées aux 1°, 2° et 3° ;

5° l'emploi des langues pour l'enseignement dans les établissements créés, subventionnés ou reconnus par les pouvoirs publics.

La loi arrête les matières culturelles et personnalisables visées aux paragraphes 1° et 2°, ainsi que les formes de coopération visées au paragraphe 4° et le mode selon lequel les traités sont conclus. Les décrets adoptés par le Parlement germanophone ont force de loi dans la région de langue allemande, sauf aux minorités francophones, lesquelles relèvent de la Communauté française.

4.1 Les langues de la législation

Les langues de la législation concernent le Parlement et le gouvernement fédéral, la Communauté germanophone et la Région wallonne.

Jusqu'à récemment, les lois du Parlement fédéral n'étaient rédigées qu’en français et en néerlandais, mais elles le sont aujourd'hui généralement en trois langues; de plus, le Moniteur belge publie, sans arrêt, les traductions officielles des anciennes lois de la législation belge, mais c'est un travail de très longue haleine. L’État fédéral reconnaît le français, le néerlandais et l’allemand comme ses trois langues officielles; la Constitution de 1994 est rédigée en ces trois langues. Au Parlement fédéral, les représentants de la Communauté germanophone (un député et un sénateur) doivent donc prendre la parole en français ou en néerlandais. Théoriquement, ils pourraient se servir de leur langue maternelle dans des cas exceptionnels; lorsque c’est le cas, leurs interventions sont notées en allemand dans les Annales parlementaires. Pour des raisons pratiques évidentes, les interventions en allemand demeurent extrêmement limitées.

En ce qui a trait aux actes législatifs de la Communauté germanophone et aux débats parlementaires, les 25 membres du Parlement local n'utilisent que l'allemand; il en est de même pour le gouvernement de la Communauté germanophone de Belgique.

Au sein du Parlement wallon dont fait partie la région de langue allemande dans les affaires régionales, les parlementaires germanophones peuvent recourir à l’allemand dans leurs interventions. Leurs déclarations sont alors traduites simultanément en français (loi du 5 août 1980). Tous les décrets du gouvernement wallon s’appliquant spécifiquement à la région de langue allemande peuvent être traduits en allemand, sinon ils ne sont rédigés qu’en français.

4.2 Les services publics

Conformément à l’article 11 (par. 2) de la Loi sur l'emploi des langues en matière administrative du 18 juillet 1966, les communications des pouvoirs publics avec les citoyens doivent être en allemand et en français

Article 11

Dans les communes de la région de langue allemande les avis, communications et formulaires destinés au public sont rédigés en allemand et en français.

L’article 12 de la même loi précise les modalités suivantes:

Article 12

Tout service local établi dans la région de langue française, de langue néerlandaise ou de langue allemande utilise exclusivement la langue de sa région dans ses rapports avec les particuliers, sans préjudice de la faculté qui lui est laissée de répondre aux particuliers résidant dans une autre région linguistique dans la langue dont les intéressés font usage.

Toutefois, il est toujours répondu dans la langue utilisée par le particulier, quand celui-ci s'adresse en français ou en allemand à un service établi dans une commune malmédienne ou dans une commune de la région de langue allemande.

Toute l'administration dépendant de la juridiction de la Communauté germanophone fonctionne en allemand. Pour les services publics tels les services de santé, les services sociaux, la police, le téléphone, etc., bien que les usagers aient généralement le choix entre le français et l’allemand, c’est cette dernière langue qui reste massivement employée.

Dans la correspondance écrite avec les germanophones, l'administration fédérale de Bruxelles utilise l'allemand si le particulier en fait usage. Des formulaires rédigés en allemand (ou bilingues français-allemand) sont toujours à la disposition du public d'expression allemande. Les avis et communications destinés au public de la région de langue allemande se font uniquement en allemand. Mais en ce qui concerne les communications orales, certains germanophones jugent la situation insatisfaisante, car de nombreux fonctionnaires de l'État central, en poste dans la région de langue allemande, n'ont qu'une connaissance approximative de l'allemand. Par ailleurs, il existe des unités unilingues allemandes dans l'armée belge.

Pour ce qui est des affaires de la Région wallonne (dont, rappelons-le, les germanophones font partie), les services sont en français dans la région de langue française et en allemand dans la région de langue allemande (ou ils sont bilingues).

Enfin, l’article 15 de la Loi sur l'emploi des langues en matière administrative du 18 juillet 1966 prévoit les modalités concernant les qualités linguistiques exigées à ceux qui postulent un emploi dans les services publics de la région de langue allemande:

Article 15

Dans les services locaux établis dans les régions de langue française, de langue néerlandaise ou de langue allemande, nul ne peut être nommé ou promu à une fonction ou à un emploi s'il ne connaît la langue de la région.

Les examens d'admission et de promotion ont lieu dans la même langue.

Le candidat n'est admis à l'examen que s'il résulte des diplômes ou certificats d'études requis qu'il a suivi l'enseignement dans la langue susmentionnée. À défaut d'un tel diplôme ou certificat, la connaissance de la langue doit au préalable être prouvée par un examen.

Si la fonction ou l'emploi est conféré sans examen d'admission, l'aptitude linguistique requise est établie au moyen des preuves que l'alinéa 3 prescrit à cet effet.

En somme, dans la région de langue allemande, la connaissance de l’allemand constitue une condition implicite de recrutement pour la plupart des emplois, même dans les entreprises privées. Pour les désignations et promotions dans les administrations locales de la Communauté germanophone, le principe qui prévaut est que personne ne peut être désigné ou promu à une fonction ou à un poste s'il ne connaît pas l'allemand. Et les examens en vue d'un recrutement ou d'une promotion se déroulent en allemand.

4.3 Les matières judiciaires

Les germanophones ont le droit utiliser l'allemand dans les tribunaux, y compris dans les cours d'appel hors de la région de langue allemande. Généralement, les services d’interprète allemand-français ne sont pas nécessaires, puisque l’audience se déroule dans la langue choisie par les parties. Depuis 1988, une nouvelle loi a permis la création d’un arrondissement judiciaire à Eupen. Si un justiciable résidant hors de la région germanophone demande que la procédure soit en allemand, il est alors renvoyé à l’arrondissement judiciaire d’Eupen.

Cependant, plusieurs germanophones restent pourtant insatisfaits. Dans certains cas, il leur est difficile, voire impossible, d'obtenir un procès en allemand en dehors de la région de langue allemande; c'est notamment le cas dans les communes de Verviers et de Malmédy. Lorsqu’une personne souhaite être entendue en allemand, le tribunal fait appel aux services d’un interprète. La Cour de cassation est la seule instance judiciaire devant laquelle la procédure ne peut se dérouler en allemand, elle est soit en français soit en néerlandais.

4.4 L’enseignement

C’est principalement la Loi sur l'emploi des langues en matière administrative du 18 juillet 1966, qui constitue l’assise juridique du système scolaire dans la région de langue allemande. Dans toute la «Nouvelle Belgique», l’allemand est la langue d’enseignement obligatoire, sauf pour les cinq écoles francophones (primaires) de la région pour lesquelles la loi belge a prévu des facilités. Les germanophones disposent donc de leurs écoles en allemand, de la maternelle à la fin du secondaire. À partir de la troisième année du primaire, selon les conditions fixées par le Conseil de la Communauté germanophone, il est possible de dispenser une partie des cours en français dans les écoles primaires, secondaires et supérieures. Pour ce qui est du matériel didactique, la plus grande partie provient de la République fédérale d'Allemagne. Seuls les outils pédagogiques pour les cours de langues étrangères et pour des matières se rapportant spécifiquement à la Belgique font exception à la règle.

Dans certaines communes, les enfants germanophones peuvent recevoir un enseignement dans l’une des autres langues officielles si 16 parents (ou huit chefs de famille) en font la demande. Présentement, plus de 88 % des enfants germanophones du primaire suivent leurs cours en allemand. L'enseignement du français comme langue seconde est obligatoire dès la 5e année du primaire.

4.5 L’affichage public et commercial

Les inscriptions officielles du gouvernement local sont généralement bilingues (allemand-français) avec prédominance de la langue allemande. Pour ce qui est des communes, les inscriptions ont tendance à apparaître en allemand, conformément à l'unilinguisme territorial belge, mais quelques communes utilisent le bilinguisme allemand-français; l'odonymie (les nom de rue) et la toponymie (les noms de lieu) utilisent presque uniquement l'allemand, de même que la signalisation routière. Contrairement aux régions flamande et wallonne, les indications toponymiques des villes françaises ou néerlandaises ne sont pas traduites; elles ne portent donc qu'un nom français, néerlandais ou allemand.

En ce qui concerne les commerces privés, l'unilinguisme allemand est la règle générale même si l'affichage commercial n'est soumis à aucune réglementation. On peut relever des cas d'unilinguisme français (de 10 % à 15 % selon les communes), parfois de bilinguisme allemand-français ou français-allemand. De façon générale, l'unilinguisme allemand ou français (plus rare) demeure plus fréquent que le bilinguisme.

4.6 Les médias

La communauté germanophone de Belgique dispose d'une station de radio publique officielle, la BRF ou Belgischer Rundfunk der Deutschsprachigen Gemeinschaft (Radio-télévision belge de langue allemande), qui diffuse des programmes entièrement en allemand 16 heures par jour qui peuvent être captés par une audience potentielle d'un million de germanophones. Il existe aussi neuf stations de radio privées officiellement reconnues et auxquelles des fréquences sont attribuées par le gouvernement de la Communauté germanophone, notamment le Ministerium der Deutschsprachigen Gemeinschaft. Elles diffusent essentiellement en allemand, jusqu'à 24 heures par jour, sur différentes ondes dans certaines localités et régions. Quant à la Radio-Télévision belge (RTB), elle produit des émissions quotidiennes en allemand, mais la radiotélévision locale, BRF, ne diffuse qu’en allemand.

Il existe aussi un quotidien en allemand, le Grenzecho, qui traite des nouvelles internationales et régionales, des problèmes d'actualité et de la culture régionale; il tire à environ 13 500 exemplaires. Les germanophones peuvent compter aussi sur plusieurs hebdomadaires et mensuels tels que Der Wochenspiegel, Der Bauer, Zwischen Venn und Schneifel, etc. Par ailleurs, les hebdomadaires en langue allemande publiés en Allemagne sont disponibles partout. Les germanophones disposent de leur propre maison d’édition – une douzaine de volumes sont publiés par année – qui publie aussi le magazine mensuel Der Kontakt.

Les membres de la communauté germanophone sont d'avis que la protection dont ils bénéficient n'est pas toujours adéquate et demandent des réformes. Force est de constater que la législation belge ne contient aucune disposition particulière au sujet de l'allemand. Il faut constamment se référer à la reconnaissance de l'allemand comme l'une des trois langues officielles pour clarifier la situation juridique. De plus, les cantons germanophones sont incorporés dans l'arrondissement de Verviers (Wallonie) lors des élections fédérales à la Chambre des représentants et au Sénat, sans parler du Parlement wallon, avec pour résultat que les germanophones sont toujours minoritaires. C'est pourquoi les germanophones désirent que leurs cantons deviennent une région  — une quatrième!  — à l'exemple de la Flandre, de la Wallonie et de Bruxelles-Capitale. Le 21 mars 2000, deux députés de la Volksunie lançaient un pavé dans la mare en proposant, ni plus ni moins, la création d'une nouvelle province belge: la province d'Eupen-Saint-Vith! La province de Liège va-t-elle perdre 70 000 habitants au profit d'une nouvelle entité provinciale qui regrouperait les neuf communes de langue allemande?Sur le coup, même le ministre-président de la Communauté germanophone s'est montré très réticent face à une telle perspective. Pourtant, l'affaire n'est pas terminée, on en débat à Eupen et à Liège.

Cependant, compte tenu de la situation qui prévaut pour la plupart des minorités du monde, on doit admettre que la protection dont jouit la petite communauté allemande de Belgique paraît tout à fait exceptionnelle. En matière de reconnaissance et de respect des minorités, il s'agit là d'une politique linguistique qui, en plus, a fait ses preuves. Étant donné le statut officiel de l’allemand dans la région de langue allemande et la grande vitalité de cette langue en Europe centrale, l’existence de l’allemand en Belgique ne semble pas menacée à court ou à moyen terme. On peut déplorer toutefois que cette reconnaissance ne soit pas davantage étendue dans la région malmédienne et la région d’Arlon (pour le luxembourgeois) et, surtout qu'elle ne soit pas équivalente à celle des francophones et des néerlandophones.  S'il est vrai que les lois linguistiques belges sont très compliquées, il faut bien admettre que la communauté germanophone en profite pleinement, car son poids politique est excessif par rapport à son poids démographique.

Date de la dernière mise à jour: 19 avr. 2006
 
 
 

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